Burundi / Tanzanie : le regard d’une réfugiée sur son parcours en quête de sécurité

12 juin 2015
Burundi / Tanzanie : le regard d’une réfugiée sur son parcours en quête de sécurité
Kigoma (Tanzanie), 20 mai 2015. Comme il n’y a pas de baie sur le lac Tanganyika dans le village de Kagunga, des petites embarcations sont utilisées pour transférer les réfugiés burundais jusqu’aux navires. CC BY-NC-ND/CICR/L. Kamau

Amala Niyogushima installe son bébé sur une table. À côté d'elle, des enfants attendent impatiemment la distribution de biscuits et de sodas qui leur permettront de se remettre du long trajet parcouru. Ils ont fui la menace de violence mais doivent désormais affronter un avenir incertain.

Le 20 mai, nous nous entretenons avec Amala (prénom fictif) sur un navire malgache – l'un des deux navires loués par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) pour transporter des réfugiés burundais depuis le village de Kagunga, situé au bord du lac Tanganyika, à la ville de Kigoma (Tanzanie).

Ces enfants se trouvent sur un navire qui les emmène du village de Kagunga à la ville de Kigoma. Des biscuits énergétiques sont distribués à tous les réfugiés à bord, qui n'ont pas fait de vrai repas depuis des jours. CC BY-NC-ND/CICR/L. Kamau

Amala embarque après avoir passé deux semaines sur la rive du lac à Kagunga. Soulagée de pouvoir elle aussi rejoindre Kigoma, elle nous raconte ce qui l'a poussée fuir en Tanzanie.

Début avril, un groupe d'hommes qu'Amala ne connaît pas fait irruption chez elle à la recherche de son mari, qui est absent. Amala doit faire passer un message : ils reviendront. De retour à la maison, une fois le message reçu, le mari d'Amala part se cacher.

Parallèlement, à Rumonge, le village d'Amala, des rumeurs d'escalade de la violence commencent à circuler et, à la mi-avril, plus personne ne se sent en sécurité. Amala est face à un dilemme : enceinte de neuf mois, elle ignore où se trouve son mari. Elle ne peut faire autrement que d'attendre d'accoucher. Ses voisins commencent à fuir. D'autres personnes viennent la questionner au sujet de son mari et l'accusent même de le cacher. Amala commence sérieusement à craindre pour la sécurité de sa famille.

Un voyage de six heures en quête de sécurité

À cette période, de plus en plus de personnes quittent le village, et les rumeurs d'un éclatement imminent de violences ne font qu'amplifier. Deux semaines après avoir accouché, Amala a repris suffisamment de forces pour se déplacer, et le 6 mai, avec ses cinq enfants et quelques autres villageois, elle entame un trajet de six heures jusqu'à Kagunga, à la frontière du Burundi avec la Tanzanie.

Cette semaine-là, le HCR indique que l'afflux de réfugiés n'a jamais été aussi important : plus de 15 000 personnes seraient déjà entrées en Tanzanie par Kagunga. Amala passe des jours difficiles à Kagunga, en raison du manque de nourriture, d'eau et d'abris. La situation empire même du fait d'une flambée de choléra, qui a déjà fait 31 victimes.

Mais le jour où nous écoutons son récit, Amala est pleine d'espoir, car elle se rapproche de Kigoma, un endroit sûr, où elle pourra enfin vivre en paix. Les souvenirs qu'elle a du Burundi sont empreints de souffrance, et le seul espoir qu'elle nourrit est celui d'une vie nouvelle. Pour certains réfugiés, la Tanzanie a déjà représenté un havre de paix au moins deux fois au cours de leur existence.

Alors qu'Amala, sa petite fille serrée contre la poitrine, monte dans le bus qui la transfèrera au stade, il n'est pas difficile d'imaginer la vie dont elle rêve pour ses enfants.

L'histoire d'Amala compte parmi les récits de plus de 70 000 réfugiés ayant fui le Burundi pour la Tanzanie en raison des troubles civils causés par l'instabilité politique. Actuellement, moins de 4 500 réfugiés se trouvent encore à Kagunga, tandis que 42 000 personnes ont été installées dans le camp de réfugiés de Nyarugusu.

Photos : CC BY-NC-ND/CICR/Lynette Kamau

Kigoma (Tanzanie). Des petites embarcations sont utilisées pour transférer les réfugiés burundais jusqu'aux navires.

Kigoma (Tanzanie). Des petites embarcations sont utilisées pour transférer les réfugiés burundais jusqu'aux navires.

Kigoma (Tanzanie). Ces enfants se trouvent sur un navire qui les emmène du village de Kagunga à la ville de Kigoma.

Kigoma (Tanzanie). Ces enfants se trouvent sur un navire qui les emmène du village de Kagunga à la ville de Kigoma.