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Azerbaïdjan : les habitants plantent des arbres pour se protéger des tirs

Près de vingt ans après la signature de l'accord de cessez-le-feu conclu en 1994 lors du conflit du Haut-Karabagh, les civils vivant de part et d'autre de la frontière internationale entre l'Arménie de l'Azerbaïdjan et du côté azéri de la ligne de contact avec le Haut-Karabagh, vivent encore dans des conditions humanitaires difficiles.

Au fil des années, les habitants ont appris à s'accommoder de la situation et trouvé des moyens de se protéger du danger que représente la ligne de front.

Children have to use this road every day on the way to and from school. But it is exposed to fire from military positions. The trees on the left will screen children and others using the road.

District de Terter, Azerbaïdjan. Chaque jour, pour se rendre à l'école et en revenir, les enfants doivent emprunter cette route, pourtant exposée aux tirs des militaires. Les arbres du côté gauche protègeront les écoliers et tous ceux qui emprunteront la route. CC BY-NC-ND / ICRC / N. Lambert

Même les activités du quotidien présentent des dangers, que ce soit pour les enfants sur le chemin de l'école ou pour les agriculteurs qui vont travailler dans leurs champs. Malgré le cessez-le-feu, les civils risquent régulièrement d'être touchés par les tirs de militaires tout proches. Les deux localités azéries de Gapanli et Garadaghli, dans le district de Terter, font partie des plus exposées.

Au cours de l'une de nos visites régulières de suivi des projets menés par le CICR, un des habitants a montré à notre équipe les saules qu'ils plantaient pour dissimuler leurs maisons et leurs champs et ainsi ne pas être vus des militaires situés à proximité. Nicolas Lambert, chef de la sous-délégation du CICR à Barda, explique : « Le village n'avait pas les capacités nécessaires pour planter des arbres en nombre suffisant, et ceux qu'ils avaient réussi à planter ne remplissaient par leur fonction l'hiver, lorsqu'ils perdent leurs feuilles. »

Le CICR a toujours à cœur d'appuyer les initiatives communautaires qui aident les populations à se protéger des dangers environnants. Les villageois et le CICR ont donc décidé de planter des arbres à feuillage persistant le long de la route menant aux champs et à l'école, ainsi qu'autour des maisons les plus exposées.

Trees planted along the road will help keep villagers safe from bullets.

District de Terter, Azerbaïdjan. Les arbres plantés le long de la route contribueront à protéger les villageois des tirs. CC BY-NC-ND / ICRC / N. Lambert

Le CICR a fourni 3 000 arbres aux deux villages. Mille d'entre eux ont été plantés le long de la route menant de l'école au village, et les 2 000 autres le long de la route menant du village aux champs.

Nous avons veillé à ce que notre présence soit bien visible dans les villages pendant la plantation des arbres, en arborant notre emblème de façon à ce que toutes les parties au conflit le voient. Les emblèmes de la croix rouge et du croissant rouge attestent du caractère purement humanitaire des activités menées. Les Conventions de Genève spécifient qui est autorisé à utiliser ces emblèmes, et imposent aux belligérants de protéger le personnel et les équipements qui les arborent et de faciliter leur travail.

The tree-planting crew, with the protective emblem of the ICRC much in evidence.

District de Terter, Azerbaïdjan. L'équipe chargée de planter les arbres, avec l'emblème protecteur du CICR bien en évidence. CC BY-NC-ND / ICRC / N. Lambert

Huseynov Arif et sa famille vivent à huit dans une des maisons les plus proches de la ligne de front. « Les tirs font pratiquement partie de notre quotidien » nous a expliqué M. Arif, en nous montrant les derniers impacts de balles sur sa maison. Il y a deux ans, plusieurs de ses moutons ont été tués. Le CICR lui a remis 95 arbres à planter autour de son jardin, et celui de son voisin âgé. Au total, 710 arbres ont été remis à neuf familles de Gapanli et Garadaghli.

Samiq Mammadov, l'instituteur, nous a expliqué combien ces arbres étaient appréciés. « Notre école est particulièrement exposée. Grâce aux arbres plantés le long de la cour de récréation, les enfants qui jouent ici sont plus en sécurité. » Il pense aussi que c'est une bonne idée d'avoir planté des arbres le long de la route : « Les enfants empruntent tous les jours cette route ; il vaut mieux qu'on ne puisse pas les apercevoir depuis les postes militaires. »

Les 100 arbres que le CICR a fournis pour la cour de récréation de l'école ont été plantés par les enfants sous la supervision de M. Mammadov.

Certains arbres n'ont pas supporté la sécheresse de l'été 2014, mais les villageois ne se sont pas découragés ; cette année, ils ont demandé au CICR de les aider à remplacer les arbres morts.