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Burundi : la sécurité économique pour les cheffes de foyer

Durant l'année 2016, nous avons développé à Bujumbura un programme de sécurité économique pour la première fois. Dans un projet pilote, environ 300 femmes cheffes de foyer en situation précaire ont bénéficié d'une assistance afin de développer des petits projets économiques. En 2017 ce programme est reconduit et élargit.
Thérèse, l'une des bénéficiaires du projet pilote, sort du lot. Elle a ouvert un restaurant qui a beaucoup de succès. Jeannette, une autre bénéficiaire, tire elle aussi son épingle du jeu en vendant du gravier et rêve de construire sa propre maison.

"Depuis novembre dernier, mes enfants mangent à nouveau trois repas par jour", se réjouit Thérèse, veuve depuis plus d'un an.

Cette mère de 34 ans avait appris sur le tas à bien cuisiner. En 2015, Thérèse a perdu son mari et a dû abandonner le petit restaurant qu'elle tenait avec lui. "Je me suis installée avec mes 5 enfants chez une veuve dans le quartier de Kamenge, à Bujumbura. Elle nous a prêté une chambre et partageait son seul repas quotidien avec nous", raconte-t-elle.

Avec un bon sens des affaires, Thérèse débordait d'idées pour commencer un commerce mais n'avait pas les moyens de se lancer : "J'observais comment d'autres femmes faisaient le commerce de légumes et de fruits, et je réfléchissais à ce que je pourrais faire moi-même", se souvient-elle.

Un jour, les voisins de Thérèse rencontrent Gonzague et Bosco, des volontaires de la Croix-Rouge du Burundi (CRB), lors d'un recensement de femmes veuves qui sont dans l'incapacité de faire vivre leur famille. En effet, le CICR, en collaboration avec la CRB, lance un programme de « cash conditionnel » permettant à ces femmes de démarrer un projet garantissant un meilleur revenu. Les voisins leur parlent de Thérèse et de sa situation difficile. Peu après, Thérèse présente son projet de restaurant et elle est rapidement sélectionnée pour le programme.

Grâce à une somme de 200'000 FBU (environ 120 dollars USD), elle ouvre son premier petit restaurant non loin de chez elle que ses nombreux clients appellent "Ku Mutaka" (Le Parapluie). Il se trouve bien positionné à côté d'une station taxi-vélo. Le succès de son petit déjeuner est bientôt retentissant. Le matin elle vend près d'une centaine de plats. Les conducteurs de taxi-vélo font la queue pour manger du manioc, des haricots, du riz et des patates douces. Après quelques temps, Thérèse a également pu ouvrir un deuxième restaurant dans le marché de Kamenge, sous un toit. Elle y sert le petit déjeuner et le repas de midi.

Tous les jours, dès 4h30 du matin, Thérèse s'affaire dans sa cuisine. Quelques personnes l'aident en mettant la main à la pâte. Ses casseroles mijotent pendant deux heures avant qu'un jeune conducteur de taxi-vélo ne les embarque encore chaudes pour les placer sous le fameux parapluie. Les clients défilent dès 7h30, et gare aux retardataires, les casseroles sont souvent vides une heure plus tard!
Depuis qu'elle peut nourrir ses cinq enfants trois fois par jours et leur acheter quelques fournitures scolaires ou des médicaments, Thérèse est rassurée. Grâce aux petites économies qu'elle parvient à rassembler, son rêve est de devenir grossiste en légumes en se rendant régulièrement à Gitega, pour ensuite revendre choux et manioc aux marchands de Kamenge. Entretemps, Thérèse prodigue volontiers des conseils à d'autres femmes en difficultés. Elle se réjouit de pouvoir finir sa journée de travail en buvant un thé chaud au lait avec ses enfants, alors qu'elle pense déjà au menu du lendemain.

Jeannette vend du gravier de la rivière Kanyosha

Jeannette ramasse et achète du gravier à la rivière Kanyosha, sud de Bujumbura, et le revend. Cette activité économique lui permet de nourrir ses enfants 3x par jour et de faire de petites économies. CC-BY-NC-ND / CICR / Vanessa SHARP

La vie de Jeannette et de ses trois enfants s'est également améliorée grâce au programme. Avant de perdre son mari, Jeannette faisait le commerce de légumes à Kanyosha. Mais un jour, elle aussi a tout perdu et a été obligée de partir vivre avec ses enfants dans des maisons en cours de construction. "Désormais, grâce au commerce de graviers que j'ai pu entreprendre, j'ai loué une chambrette et mes enfants ont droit à trois repas par jour", raconte-t-elle avec un sourire. Jeannette a déjà économisé un peu d'argent dans une banque de microfinance locale. Son rêve est d'acheter une parcelle et de construire sa propre maison.

Economies et trois repas par jour

Près de 300 femmes cheffes de foyer sélectionnées pour ce programme avaient toutes perdu leur source de revenu. Elles ont des enfants à charge qu'elles avaient du mal à nourrir. Par rapport à l'évaluation initiale qui avait révélé un fort taux de malnutrition chez ces enfants, Aurélie Grangé, responsable du département « sécurité économique » de notre délégation au Burundi, explique avoir mesuré une évolution positive dans le niveau de vie de ces familles. "Ce programme a permis à ces femmes et à leurs enfants de passer, pour certains, d'un repas à trois repas par jour. Plusieurs femmes ont déjà réussi à économiser et se disent prêtes à réinvestir pour agrandir leur projet". Une fois leur projet accepté, les femmes ont d'abord touché une somme de 130'000 FBU (environ 78 dollars USD), complétée quelques semaines plus tard par 70'000 FBU (environ 42 dollars USD).

Regardez aussi la galerie photo à propos du restaurant de Thérèse et/ou téléchargez notre première édition du bulletin d'information de l'année 2017