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Conférence des États parties à la Convention sur les armes biologiques - 2017

Réunion des États parties à la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) et à toxines et sur leur destruction, Genève, Suisse. Déclaration du Comité international de la Croix-Rouge

Le succès a couronné les efforts en vue de l’interdiction des moyens de guerre biologiques, dont l’emploi a été proscrit par le Protocole de Genève de 1925 et la Convention de 1972. Comptant à ce jour 179 États parties, la Convention sur les armes biologiques bénéficie d’une adhésion quasi universelle.

L’interdiction d’employer des armes biologiques est aujourd’hui une règle du droit international humanitaire coutumier qui lie toutes les parties – y compris les groupes armés non étatiques – dans tout type de conflit armé.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) félicite le Samoa, dernier en date des États ayant déposé leur instrument d'adhésion à la Convention sur les armes biologiques, et il exhorte les 17 États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier ce traité ou à y adhérer sans tarder. Rien ne peut justifier qu’un État ne soit pas partie à la Convention, et tous les États devraient être en mesure de bénéficier des avantages et des protections qui en découlent. Le CICR demande également aux États qui maintiennent des réserves au Protocole de Genève de les retirer, étant donné que l’interdiction de l’utilisation des armes biologiques s’applique en toutes circonstances.

Malgré les succès remportés en termes d’universalité et d’adhésion, la Convention sur les armes biologiques doit encore surmonter des difficultés pour s’adapter à l’évolution des circonstances et augmenter le niveau de sa mise en œuvre ; cela est apparu clairement lors de la Conférence d’examen de l’an dernier, aucun consensus n’ayant pu être dégagé sur un programme de travail intersessions. De fait, les progrès scientifiques et technologiques se poursuivent à un rythme soutenu, alors que se perdent des occasions de renforcer à l’échelle mondiale les mesures de protection contre les empoisonnements et la propagation délibérée des maladies.

La présente réunion offre une nouvelle occasion de progresser sur les questions de fond et de mettre en place – pour 2018 et au-delà – un programme de travail efficace, reflétant l’importance de la protection de l’humanité contre les terribles effets des armes biologiques.

D’autres discussions récentes pourront servir de base aux travaux à venir. Par exemple, le CICR a participé à la conférence organisée en novembre 2017 à Sotchi par la Fédération de Russie sur le thème Global Biosecurity Challenges : Problems and Solutions [Défis mondiaux de la biosécurité : problèmes et solutions]. Le CICR a également salué la déclaration commune de la Russie, du Royaume-Uni et des États-Unis reconnaissant l’importance de renforcer la Convention sur les armes biologiques et d’adopter un programme de travail pour 2018.

Plusieurs domaines sur lesquels les travaux pourraient porter à l’avenir ont été proposés dans la déclaration commune, ainsi que dans les nombreux documents de travail soumis par les États parties en vue de la Conférence d’examen de 2016 et de la présente réunion des États parties. Du point de vue du CICR, afin de renforcer les interdictions de la Convention, les futurs travaux devraient porter sur quatre domaines clés :

Premièrement, les États parties devraient explorer l’ensemble des idées et des approches relatives à la surveillance du respect des obligations (examen des mesures de vérification compris) en vue de mettre au point des moyens efficaces de contrôle et d’évaluation de l’application de la Convention.

Deuxièmement, les États parties doivent être prêts à réagir et à se porter mutuellement assistance en cas d’utilisation d’armes biologiques, notamment en renforçant les capacités d’aide aux victimes. Par conséquent, l’opérationnalisation de l’article VII devrait constituer un autre domaine prioritaire, l’objectif étant de renforcer les capacités de réaction là où elles sont insuffisantes, d’améliorer la coordination entre les intervenants et, enfin, de lever les obstacles à une réponse efficace.

En 2016, dans un document de travail soumis au Comité préparatoire de la Conférence d’examen (document de travail 39), le CICR a attiré l’attention sur les difficultés mises en évidence par la réponse humanitaire internationale lors de l’éruption d’Ebola dans les années 2014-2016. Il a également relevé que les enseignements tirés de cette épidémie naturelle pouvaient être mis à profit pour améliorer la capacité de réponse en cas d’attaque délibérée.

Dans ce contexte, d’autres efforts ont été menés récemment avec succès pour examiner les difficultés et les exigences de la coordination internationale de la réponse en cas de dissémination volontaire d’agents biologiques. Il s’agit notamment d’une réunion tenue en septembre à Wilton Park, au Royaume-Uni, et d’un exercice de simulation interinstitutions organisé en octobre à Genève par l’Unité d’appui à l’application de la Convention sur les armes biologiques. Les États sont également encouragés par le CICR à améliorer et adapter les mécanismes nationaux d’intervention, de manière à renforcer les mesures de protection contre les épidémies, naturelles ou délibérées.

Troisièmement, il est nécessaire de prévoir dans la Convention sur les armes biologiques un mécanisme efficace pour évaluer les conséquences des avancées scientifiques et technologiques. Ce mécanisme devrait permettre aux États parties de rester au courant des avancées susceptibles d’induire de nouveaux risques quant à l’utilisation de la biotechnologie à des fins hostiles, tout en veillant à ce que la recherche biologique à des fins pacifiques puisse se poursuivre sans entraves.

Quatrièmement, le CICR insiste à nouveau sur la nécessité de soutenir les efforts visant à assurer la mise en œuvre nationale effective de la Convention. Sur le plan juridique, ainsi que pour des raisons de santé publique et de sécurité, les États parties doivent veiller à ce que leur législation nationale reflète leurs obligations internationales ; ils doivent également veiller à ce que des mesures appropriées soient mises en place, s’agissant de biosûreté, de biosécurité, de contrôle des exportations et d’application de la loi. Le CICR a élaboré, conjointement avec le VERTIC (Centre de recherche, de formation et d’information sur la vérification), un modèle de loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes biologiques et il peut aider les États en la matière.

Nous avons vu les effets dévastateurs – sur la santé publique, le bien-être économique, ainsi que sur la sécurité nationale et internationale – des pandémies de maladies infectieuses dues à des causes naturelles ; nous avons vu également à quel point il était difficile d’apporter une réponse humanitaire efficace et coordonnée. Cela devrait être suffisant pour convaincre les États parties de prendre au sérieux les responsabilités qui leur incombent individuellement et collectivement afin de prévenir la propagation délibérée – ou accidentelle – de maladies.

Le CICR prie instamment les États parties de saisir l’occasion offerte par cette réunion pour convenir d’un programme de travail qui traduise leur détermination à s’engager dans une démarche globale visant à ce que les processus vitaux au cœur de l’existence humaine ne soient jamais manipulés à des fins hostiles.