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RD Congo : des partenariats et des dispositifs de financement innovants favorisent l’accès à l’eau potable

Le projet du CICR « Eau pour Goma Ouest » (GWWP) mené en République démocratique du Congo va assurer un accès à l’eau potable à plus de 330 000 personnes à un coût abordable d’ici 2026.

La mise en place de solutions viables à long terme prend du temps et nécessite de l'argent. Pour réussir, les projets de cette nature doivent bénéficier de la confiance des principaux partenaires et de dispositifs de financement public-privé innovants.

À Goma, dans l'est de la RDC, l'eau ne manque pas. La ville est située sur les rives du lac Kivu, et il y pleut beaucoup.

Mais il y a un problème de taille : vous ne tremperiez pas vos lèvres dans cette eau... à moins qu'elle n'ait été traitée. En effet, diarrhée, choléra ou autres maladies d'origine hydrique menacent.

Malheureusement, pour plus de la moitié de la population qui n'a pas accès à une eau propre, la question ne se pose pas.

Les habitants n'ont d'autre choix que de puiser directement dans le lac de l'eau qu'ils doivent ensuite transporter sur de longues distances dans de lourds jerrycans de 20 litres, ou de payer des sommes colossales à des points de distribution où l'eau n'est en plus pas disponible chaque jour en raison de l'état de dégradation de l'infrastructure d'approvisionnement.

Le temps presse, car les prévisions montrent que la ville comptera 1,1 million d'habitants d'ici la fin de la décennie. La situation est particulièrement grave dans l'ouest de Goma, où les communautés les plus vulnérables vivent dans des conditions sanitaires désastreuses.

 

Didier Revol / CICR

Les vendeurs de rue s'approvisionnent en eau directement dans le lac.

Le projet du CICR « Eau pour Goma Ouest » a pour but d'approvisionner en eau potable 330 000 habitants de la ville d'ici 2026. En s'appuyant sur la présence du CICR à Goma depuis des dizaines d'années et sur sa connaissance approfondie du contexte, le projet assurera un accès durable à l'eau potable à un prix abordable. Les vies seront transformées dans cette région qui a connu des crises multiples au cours des dernières décennies, mêlant conflit, violence et catastrophes naturelles.

Ce projet aura un effet positif durable sur la vie de centaines de milliers de personnes. Sa mise en œuvre montre à quel point les partenariats locaux et les partenariats entre le monde humanitaire, le domaine du développement et le secteur privé sont devenus importants. Ces partenariats se nourrissent de compétences et d'expertises complémentaires, ils garantissent une appropriation locale et proposent de nouveaux modes de financement. Cette approche collaborative aura des retombées pérennes là où cela est le plus nécessaire.

Peter Maurer, président du CICR

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Didier Revol / CICR

Les femmes et les enfants ont souvent la tâche ingrate d'approvisionner leur maison en eau.

Lancé en 2019, le projet « Eau pour Goma Ouest » est le troisième nouveau modèle de financement du CICR, dans la continuité de l'obligation à impact humanitaire et du Fonds de transition pour le climat et l'environnement (en anglais). Doté d'une enveloppe de 40 millions de francs suisses, le projet conjugue des sources de fonds affectés à l'action humanitaire et au développement et des investissements du secteur privé.

Quelque 17 millions de francs ont été levés en mai 2022, dont 15 millions sont prévus par la Banque mondiale à travers un financement qui sera versé au gouvernement de RDC, combinant le don et le crédit (projet « Access Governance & Reform for the Electricity and Water Sectors »).

Axel van Trotsenburg, directeur général des opérations de la Banque mondiale, a fait part de sa joie de coopérer avec le CICR sur ce projet qu'il juge si « innovant et indispensable » : « Des partenariats solides et efficaces comme celui-ci sont un élément essentiel de l'approche de la Banque mondiale pour garantir le succès des activités dans des environnements fragiles, touchés par les conflits et la violence. En tirant parti des avantages comparatifs des deux organisations, nous parviendrons à assurer un approvisionnement en eau potable plus fiable aux habitants de Goma. »

Didier Revol / ICRC

Le CICR peut également compter sur le soutien de la Direction suisse du développement et de la coopération (DDC), de l'Agence suédoise de coopération internationale au développement, et de la Fondation Lombard Odier. Outre sa contribution financière, la DDC déploie des experts techniques sur le projet.

« La Suisse soutient le renforcement de l'infrastructure d'approvisionnement en eau à Goma, en vue d'améliorer le bien-être et la santé de la population et d'empêcher la propagation de maladies d'origine hydrique telles que des épidémies de choléra », indique Patricia Danzi, directrice générale de la DDC.

« Pour faire face à la complexité d'une crise, nous devons tous avoir une réflexion à court et à long terme et adapter nos approches en fonction des défis humanitaires que nous rencontrons. »

Un financement supplémentaire de 8 millions de francs suisses est recherché pour la période 2022–2023, pour permettre au CICR de finaliser la phase préparatoire et de poursuivre son action d'urgence si essentielle.

Les ingénieurs hydrauliciens du CICR travaillent en étroite collaboration avec des partenaires locaux depuis 25 ans afin de garantir que l'infrastructure existante à Goma continue de fournir de l'eau à une large partie de la ville. Le projet « Eau pour Goma Ouest » est un exemple dans la recherche de solutions durables à des urgences récurrentes, le but ultime étant de sauver des vies et d'utiliser les ressources financières plus efficacement.

Selon l'Organisation mondiale de la santé, les investissements réalisés dans l'approvisionnement en eau et l'assainissement génèrent une rentabilité économique pouvant atteindre 4,3 dollars US pour chaque dollar dépensé.

Pour Goma et sa région, cela reviendrait à un bénéfice économique à hauteur de 175 millions de dollars.
Didier Revol / CICR

Goma, partie ouest, centre de santé. Sans connexion à un réseau public d'eau et sans système d'égouts, les conditions de travail du personnel médical de ce centre sont loin d'être optimales. L'eau nécessaire au fonctionnement du centre doit être transportée à la main plusieurs fois par jour.</h2>

Le projet inclut la construction d'un réseau d'approvisionnement en eau potable, composé de stations de traitement des eaux, de stations de pompage et de réservoirs.

Une fois sur pied, cette nouvelle infrastructure nécessitera des mesures d'entretien pour garantir la pérennité du système. À cette fin, le CICR soutient également la création de la Régie provinciale, un organisme qui sera chargé de contrôler la qualité du service fourni par la compagnie privée des eaux.

Les partenariats noués au sein du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge permettent au CICR d'entretenir des liens très étroits avec les communautés bénéficiaires du projet et de veiller à ce que ce dernier reste abordable et pertinent.

« Ce projet ne vise pas uniquement à prévenir les maladies ou de graves épidémies et renforcer le système sanitaire public ; il va améliorer les conditions de vie et favoriser la croissance économique, car la population dépensera moins dans l'eau et les frais médicaux et consacrera davantage d'argent à d'autres besoins, dans le logement et l'éducation par exemple », explique Jérôme Guillaumot, ingénieur Eau et habitat au sein du CICR, responsable du projet de Goma.

« Les approches nouvelles et les partenariats innovants constituent des outils importants pour assurer la stabilité à long terme d'une région en proie à un enchaînement de crises et de conflits depuis trop longtemps. »

"Pour briser le cercle apparemment sans fin de violences, de santé publique défaillante et de sous-développement, un accès équitable à l'eau est indispensable. Pour y parvenir, il faut réunir tous les acteurs politiques et techniques à la faveur de nouveaux partenariats public-privé." - Patrick Youssef, directeur des opérations pour l'Afrique au CICR

Lisez l'éditorial de Patrick dans son intégralité : Accès à l'eau dans l'est du Congo-RDC, un défi de santé crucial

Didier Revol / CICR

Goma. Eau stagnante, absence de réseaux de collecte des eaux usées et pluviales, de nombreux quartiers de Goma sont des foyers de maladies hydriques, dont le choléra.

Goma West Resilient Water Project: Bridging the Humanitarian and Development Divide

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