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Le Jour des morts en Amérique latine : honorer les défunts dans le contexte de la pandémie de Covid-19

Le Jour des morts (Día de los Muertos) est célébré le 6 novembre dans le monde entier. Cette fête en l’honneur des défunts est l’occasion de réfléchir aux multiples répercussions du Covid-19 sur les rites culturels et religieux des communautés au Guatemala, au Mexique et au Pérou.

Les rites funéraires sont fondamentaux pour l'identité de nombreuses communautés. Avec plus d'un million de morts à ce jour, le Covid-19 a profondément bouleversé la manière dont les funérailles sont traditionnellement célébrées à travers le monde. Les règles érigées pour protéger les vivants entravent désormais le processus de deuil.

Ce reportage publié par le National Geographic (en anglais), avec l'appui du Comité international de la Croix-Rouge, examine de plus près les profondes répercussions - culturelles et religieuses - du Covid-19 sur les communautés guatémaltèques, mexicaines et péruviennes.

César Rodríguez/CICR
Daniele Volpe/CICR

Les traditions séculaires qui poussent les gens à se rassembler autour d'un verre, à chanter et à évoquer des souvenirs, ou à exécuter les dispositions testamentaires et à se recueillir sur les tombes, témoignent de la croyance ancrée dans de nombreuses cultures que les morts ne sont pas séparés de nous pour toujours ; au contraire, ils ne cessent jamais de faire partie intégrante de la communauté et de la société.

Qu'est-ce qui nous porte à accorder une telle importance aux morts ? Pourquoi déployons-nous tant d'efforts pour faire en sorte que ceux qui ont quitté cette vie reposent en paix dans leur dernière demeure ? Je crois que l'importance que nous donnons aux morts reflète l'essence même de notre humanité.

Oran Finegan, chef de l'Unité forensique du CICR

Ces rituels sont particulièrement visibles en Amérique latine, où les traditions liées aux défunts sont fortes. Déjà endeuillée par les centaines de milliers de personnes portées disparues dans le cadre de conflits armés passés et présents, de la violence armée continue, du flux incessant des vagues migratoires et des catastrophes naturelles, la région présente en outre un taux de mortalité due au Covid-19 parmi les plus élevés au monde.

Daniele Volpe/CICR
Daniele Volpe/CICR

La crise du Covid-19 est une cause majeure de détresse pour les familles qui n'ont même pas pu se rendre au chevet de leurs proches hospitalisés avant qu'ils ne décèdent. Pour aggraver encore la situation, certaines familles n'ont pas pu savoir où se trouvaient les restes de leur parent décédé car certaines morgues étaient submergées par l'ampleur de la tâche. Imaginez que vous perdiez un parent et ne puissiez pas retrouver et inhumer son corps. Cela arrive malheureusement et les conséquences sur le bien-être mental et physique de ceux qui restent sont terribles.

Sophie Orr, Directrice régionale du CICR pour les Amériques

La pandémie et les mesures préventives qui ont été prises pour l'endiguer ont touché les rites funéraires de différentes manières selon les cultures et les communautés. Largement célébré au Guatemala, au Mexique et au Pérou, le Día de los Muertos est l'occasion pour les amis et la famille d'honorer leurs proches disparus en se rendant au cimetière et en faisant des offrandes qui les accompagneront dans leur voyage.

César Rodriguez/CICR

Chaque jour, le CICR et les Sociétés nationales sont les témoins du respect que les différentes sociétés accordent aux morts à travers leurs coutumes et les voies officielles de leur cadre législatif national. Les hommages rendus aux morts expriment le respect et la reconnaissance de la dignité humaine.

Tomas Munita/CICR

Les efforts déployés pour assurer des inhumations dignes et la tenue des cérémonies qui sont au cœur même de la vie spirituelle sont essentiels, quelles que soient les circonstances. Souvent, les gens ne prennent conscience de l'importance de la médecine légale que lorsqu'ils sont confrontés à la mort d'une mère, d'un frère ou d'un enfant. Dans ces moments-là, la manière dont un corps est pris en charge revêt toute son importance.

Dans les zones de conflit et les régions touchées par la violence armée, où la capacité limitée à gérer correctement un grand nombre de décès vient encore aggraver la situation, ainsi que dans d'autres situations de violence, le CICR dialogue avec les gouvernements pour faire en sorte que les dépouilles puissent continuer à être inhumées dans la dignité. Nous interagissons également avec les communautés, les Sociétés nationales et les autorités locales pour garantir le respect des mesures sanitaires appropriées afin de limiter le risque de contamination.

Daniele Volpe/CICR
César Rodríguez/CICR

Le respect des dépouilles mortelles est inscrit dans le droit international humanitaire et le droit pénal international et assoit concrètement l'obligation générale de préserver la dignité des personnes, avec les obligations pertinentes qui en découlent. Le droit des familles des défunts de faire leur deuil, de se rendre sur les lieux de sépulture et, d'une manière générale, de procéder aux inhumations conformément à leurs croyances, a également été reconnu par les cours et tribunaux internationaux des droits de l'homme.

L'Unité forensique du CICR honore les victimes décédées et leurs familles en promouvant une gestion correcte et digne des dépouilles, en rappelant aux acteurs concernés que les morts doivent se voir restituer leur identité et que leurs restes doivent être rendus à leurs familles.

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