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Maroc : la fin de trois ans de séparation pour Denise et ses deux enfants

Lorsque Denise aperçoit sur l'écran les deux enfants dont elle est sans nouvelles depuis trois ans, l'émotion est à son comble. La maman avait rétabli un premier contact par téléphone, en juillet 2015, avec ses deux enfants, Christella, 14 ans et Hervé, 11 ans, mais de les voir enfin la bouleverse. « Je ne savais pas s'ils étaient en vie, je les ai cherchés partout. Ils ont tellement grandi, Christella a l'air plus grande que moi. »

Tout commence en 2012, lors de l'explosion d'un dépôt de munitions à Brazzaville en République du Congo qui provoque la mort de près de 300 personnes et laisse plus d'un millier de blessés. Denise habite alors le quartier de Mpila, à proximité de l'entrepôt, avec ses quatre enfants. Dans le chaos qui suit l'explosion, Denise et ses deux plus jeunes enfants, des jumeaux alors âgés de cinq ans, se retrouvent séparés des deux aînés. Rapidement, la maman entame une recherche qui s'avère infructueuse, avant de se laisser entraîner sur la route migratoire vers le Maroc par un de ses voisins. C'est de ce pays qu'elle continue, depuis, ses recherches pour retrouver la trace de ses deux aînés.

Les enfants aînés de Denise, Christella (14 ans) et Hervé (11 ans), à la délégation du CICR. Ils dialoguent avec leur maman et leurs jeunes frères au cours d'une vidéo-conférence pleine d'émotion, après 3 ans de séparation.

Kinshasa, République Démocratique du Congo. Les enfants aînés de Denise, Christella (14 ans) et Hervé (11 ans), à la délégation du CICR. Ils dialoguent avec leur maman et leurs jeunes frères au cours d'une vidéo-conférence pleine d'émotion, après 3 ans de séparation. CC BY-NC-ND / CICR / M. Renaud

De leur côté, Christella et Hervé s'enfuient loin de l'explosion. Ne retrouvant plus leur maman, ils s'arrêtent, en pleurs sur le bord de la route. « J'ai rencontré Christella et Hervé alors que je me rendais vers l'université William Boot à Kinshasa », se rappelle Thierry. « Ils m'ont approché en pleurant, disant qu'ils avaient perdu leur maman. » Thierry entreprend alors d'aider les enfants à retrouver leur mère, mais même l'appel qu'il lance sur les ondes de la radio nationale congolaise reste sans réponse. Il décide alors de prendre en charge les enfants. C'est dire sa surprise lorsqu'au matin du 21 juillet 2015, Thierry reçoit un appel téléphonique du Maroc lui demandant s'il est bien la personne qui a recueilli deux jeunes enfants un jour de mars 2012.

Un réseau mondial

Suite à ce premier appel en juillet dernier, les membres dispersés de cette famille ont eu l'occasion de se parler au téléphone, en attendant les vraies retrouvailles. La conférence vidéo, organisée par le Croissant-Rouge marocain et le CICR à Rabat et à Kinshasa le 7 août, a permis à Denise, accompagnée de ses deux petits derniers, de revoir le visage de Christella et Hervé, désormais jeunes adolescents.

L'image que voit Christella et Hervé au cours de la vidéo-conférence.

Kinshasa, République Démocratique du Congo. L'image que voit Christella et Hervé au cours de la vidéo-conférence. CC BY-NC-ND / CICR / M. Renaud

L'histoire de Denise est celle de nombreux migrants, qui dans des circonstances souvent tragiques, perdent le contact avec leurs proches. Le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge vient en aide aux personnes qui, comme Denise, ont perdu le contact avec leurs proches suite à un conflit, une migration, ou une catastrophe naturelle. « La force du réseau du Rétablissement des Liens Familiaux réside dans sa dimension mondiale. La présence de sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, et du CICR y compris dans les régions les plus reculées de la planète, nous permet d'aider ces familles à rétablir le contact avec leurs proches, ou à les retrouver », souligne Myriam Renaud, déléguée du CICR au Maroc.

Denise avec deux de ses quatre enfants lors de la visio-conférence.

Rabat, Maroc. Denise avec deux de ses quatre enfants lors de la visio-conférence. CC BY-NC-ND / CICR / M. Renaud

Grâce à son réseau de volontaires à travers le pays, le Croissant-Rouge marocain a développé, avec le soutien du CICR, un service de rétablissement des liens familiaux. Un responsable national a été nommé et des volontaires ont reçu les formations nécessaires pour leur permettre d'évaluer les besoins en la matière et d'y répondre de façon adéquate. « D'innombrables personnes attendent des nouvelles des membres de leurs proches, d'où l'importance d'un service comme celui que nous fournissons. En rétablissant des liens familiaux, le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge apporte soutien et réconfort à de nombreuses familles chaque année, » assure Yahya Ansar, Point Focal National RLF du Croissant Rouge Marocain.

Le rétablissement des liens familiaux au Maroc