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Les tribunaux ad hoc

Les tribunaux internationaux existent depuis que le système international moderne a été mis en place, et leur rôle est de régler les différends entre États ou parfois entre d'autres acteurs internationaux. Toutefois, c'est essentiellement à partir des procès de Nuremberg qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale que des tribunaux ad hoc devant juger des individus accusés de crimes ont été créés pour que soient poursuivies les infractions pénales qui sont au cœur du droit international, à savoir le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité.

Abstraction faite des procès de Nuremberg et de Tokyo, les premiers tribunaux pénaux internationaux ont été mis en place dans les années 1990, pour que les atrocités perpétrées en ex-Yougoslavie et les tueries en masse commises au Rwanda soient jugées. Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) et son pendant au Rwanda (TPIR) ont tous deux été créés par le Conseil de sécurité des Nations Unies.

Depuis, des tribunaux spéciaux ont également été institués pour poursuivre des auteurs de crimes relevant du droit national et international. On trouve des exemples de ces tribunaux mixtes au Kosovo, en Bosnie-Herzégovine, au Timor-Leste, en Sierra Leone, au Cambodge et, plus récemment, au Liban.

Ces mécanismes juridiques sont un élément important de certains scénarios d'après-conflit. Ils alimentent un débat constant sur la nécessité de promouvoir la paix et la réconciliation dans un pays ou une communauté, alors que les victimes de violations massives des droits de l'homme exigent que justice soit faite.

Les arguments avancés en faveur de la tenue d'un procès à l'issue d'un conflit, lorsque des accusations de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité ont été formulées, sont inspirés par le besoin de prévenir de nouveaux crimes, le besoin des victimes et de la communauté d'obtenir justice, et le besoin d'établir la vérité des faits pour permettre une future coexistence pacifique.

Il n'est pas possible, à ce stade, d'évaluer l'effet dissuasif des tribunaux ad hoc et leur capacité de prévention. On ne dispose pas de suffisamment d'éléments pour en juger. Il en va de même de leur capacité à établir la vérité. Leur rôle consistant à rendre la justice est plus clairement perçu par la population, mais encore doit-on identifier et traduire devant ces tribunaux les auteurs présumés des crimes.

Les juristes du CICR sont convaincus que des tribunaux tels que celui qui a été créé pour l'ex-Yougoslavie attestent d'une avancée majeure dans l'application du DIH. Ils ont renforcé le DIH en affirmant la valeur coutumière de certains principes, réduisant ainsi le fossé entre les règles applicables aux conflits armés internationaux et celles qui s'appliquent aux conflits non internationaux, et en donnant une interprétation plus souple de certaines dispositions traditionnelles du DIH pour les adapter aux réalités modernes.

Le CICR salue ces tendances, ainsi que la création de la Cour pénale internationale en complément des tribunaux ad hoc.

En tant que gardien du droit international humanitaire, le CICR soutient également les efforts déployés pour mettre fin à l'impunité en développant la justice pénale internationale, que ce soit en incitant les États à adapter leur législation afin de lutter au niveau national contre l'impunité des crimes internationaux, ou en encourageant la tendance à l'internationalisation des poursuites contre les responsables de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité.