Article

Questions-réponses sur la 5e Réunion universelle des Commissions et autres instances nationales chargées de la mise en œuvre du DIH

29 novembre — 2 décembre 2021

La cinquième Réunion universelle des Commissions et autres instances nationales de droit international humanitaire (DIH), organisée par le CICR, s'est déroulée en ligne entre le 29 novembre et le 2 décembre 2021, sur le thème « S'approprier le DIH en l'intégrant dans le droit interne et les politiques nationales ».

Rachael Kitching, collaboratrice juridique des Services consultatifs en droit international humanitaire du CICR, s'entretient avec Kelisiana Thynne, conseillère juridique principale au sein de la Division juridique du CICR, et Anne Quintin, cheffe des Services consultatifs en droit international humanitaire, à propos de la raison d'être et de la portée des réunions universelles du CICR, ainsi que des résultats de l'événement qui vient d'avoir lieu.

1. Kelisiana, pouvez-vous nous dire en quoi consistent ces réunions universelles ?

KT : Depuis 1995, le CICR est chargé d'organiser régulièrement une réunion universelle qui rassemble les commissions et autres instances nationales de DIH, ainsi que les États intéressés par la création d'une telle instance.

J'ai eu l'honneur de participer à la dernière réunion universelle, qui s'est tenue en 2016, et si nous n'avons pas eu le même sentiment d'interaction mutuelle cette année, en raison du format virtuel, cette réunion a néanmoins été une occasion précieuse d'échanger des points de vue et de partager des bonnes pratiques sur la mise en œuvre nationale du DIH.

2. Anne, pouvez-vous nous expliquer à quoi sert une commission nationale de DIH ?

AQ: Selon les Conventions de Genève de 1949, les États ont la responsabilité première de respecter et de faire respecter le droit international humanitaire. Ils sont encouragés à mettre en place des organes interministériels, communément appelés commissions nationales de DIH, pour les épauler dans cette tâche . Les principaux rôles et fonctions de ces commissions sont décrits de manière détaillée dans nos Lignes directrices pour une mission réussie.

3. Kelisiana, pouvez-vous nous dire qui a participé à la cinquième Réunion universelle ?

KT : Entre 157 et 230 participants issus des 118 commissions nationales de DIH implantées dans le monde se sont joints à nous chaque jour. Il s'agissait de membres des commissions et autres instances nationales de DIH, notamment des représentants des ministères des affaires étrangères, de la défense et de la justice, et des Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

De plus, des gouvernements intéressés par la création d'une telle instance, et des organisations internationales et régionales engagées dans la mise en œuvre nationale du DIH ont assisté à la réunion en qualité d'observateurs. En ce sens, les réunions universelles sont l'une des rares occasions de démontrer la véritable universalité du DIH, en réunissant des représentants de divers organismes et départements du monde entier pour discuter de la mise en œuvre du DIH.

Pour faciliter les interactions, une interprétation simultanée a été assurée en arabe, anglais, espagnol, français et russe.

4. Anne, pourquoi cette réunion universelle a-t-elle été intitulée « S'approprier le DIH en l'intégrant dans le droit interne et les politiques nationales » ?

AQ : L'intitulé fait référence à la Résolution 1, « S'approprier le DIH : Feuille de route pour améliorer la mise en œuvre nationale du droit international humanitaire », adoptée à la XXXIIIe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (2019).

La cinquième Réunion universelle ayant eu lieu à mi-chemin entre les XXXIIIe (2019) et XXXIVe (2023) Conférences internationales, elle a offert un cadre propice pour réfléchir à ce que les commissions nationales de DIH ont déjà accompli en lien avec la résolution 1, et pour identifier ce qu'il reste à faire d'ici à la prochaine Conférence internationale.

5. Anne, pouvez-vous nous dire quels progrès les commissions nationales de DIH ont-elles déjà réalisés au regard de la résolution 1 ?

AQ : La résolution 1 encourage la création de commissions ou d'autres instances nationales de DIH, la ratification des traités de DIH ou l'adhésion à ces traités, l'adoption des mesures législatives, administratives et pratiques qui s'imposent, ainsi que d'autres mesures connexes.

Lors de la première séance, nous avons félicité les 14 commissions nationales de DIH qui ont été créées ou relancées depuis notre dernière réunion universelle, en 2016. Après quoi, certaines de ces nouvelles instances ont pris la parole pour partager leurs expériences.

Entre janvier 2017 et la mi-novembre 2021, nous avons enregistré 209 ratifications de traités à travers le monde, et des instances de DIH nous ont parlé des mesures qu'elles ont prises pour encourager l'adoption et la mise en œuvre de ces traités.

En outre, entre janvier 2017 et décembre 2020, au moins 85 lois nationales pour l'application du DIH et d'autres instruments ont été adoptées, et les commissions nationales de DIH se sont exprimées sur leur rôle de soutien aux mesures allant dans ce sens au niveau national.

6. Anne, la deuxième séance était consacrée aux personnes portées disparues. Que peuvent faire les commissions nationales de DIH pour renforcer la protection des personnes disparues et de leurs familles pendant et après un conflit armé ?

AQ : Lors de la deuxième séance sur la question des personnes portées disparues, nous avons souligné l'utilité des études de compatibilité pour identifier les changements à apporter aux cadres nationaux afin de garantir le respect du DIH. Nous avons également mis en avant le rôle important des commissions nationales de DIH pour encourager les États à mettre en œuvre les conclusions tirées de ces études.

Nous sommes arrivés à la conclusion que ces instances peuvent faire pression pour l'adoption de lois, de politiques et de structures nationales afin de rendre compte du sort des personnes protégées, de prévenir les disparitions et d'informer les familles dans les situations de conflit armé. Un Bureau national de renseignements est un exemple de structure qui pourrait être établie dans chaque État.

7. Kelisiana, vous avez présidé la troisième séance sur les armes. Que peuvent faire les commissions nationales de DIH pour garantir l'application du DIH aux armes, aux nouvelles technologies et aux transferts d'armes ?

KT : Durant la séance consacrée aux armes, l'accent a été mis tout particulièrement sur le rôle que les commissions nationales de DIH peuvent jouer en fournissant des conseils d'experts aux gouvernements sur les transferts d'armes ou les nouvelles technologies de pointe. Il existe un large consensus sur le fait que de nombreuses armes causent des souffrances indiscriminées, superflues ou inutiles, et que beaucoup reste à faire pour remédier à ce problème.

Nous avons toutefois entendu d'excellents exemples d'interaction avec le parlement et d'élaboration de dispositions pour la rédaction de lois qui ont contribué à garantir l'application des obligations internationales dans les États concernés.

8. Kelisiana, lors de la quatrième séance, nous avons appris que certains États ont adopté des lois antiterroristes, qui peuvent parfois interférer avec la fourniture de l'aide humanitaire. Les commissions nationales de DIH peuvent-elles contribuer à garantir la cohérence et la compatibilité des cadres juridiques de lutte contre le terrorisme avec le DIH ?

KT : Bien sûr ! La dernière séance a clairement démontré qu'il est possible d'avoir des cadres juridiques cohérents et complets en matière de lutte contre le terrorisme qui répondent aux objectifs de sécurité nationale tout en étant compatibles avec le DIH et les principes de l'action humanitaire.

Nous sommes parvenus à la conclusion que l'on pouvait faire face à la menace terroriste tout en continuant de faire parvenir les secours humanitaires à ceux qui en ont besoin et d'assurer leur protection. Les commissions et autres instances nationales de DIH et les responsables gouvernementaux ont échangé sur la manière dont ils ont intégré des clauses d'exemptions humanitaires dans leur législation relative à la lutte contre le terrorisme, donnant ainsi des exemples utiles à tous ceux qui souhaitent faciliter l'action humanitaire.

9. Anne, quelle est la prochaine étape en termes de suivi de ces thèmes avec les commissions nationales de DIH ?

AQ : Les services consultatifs du CICR procèdent actuellement avec les commissions nationales de DIH et les États au suivi de leurs déclarations et des engagements pris lors de la cinquième Réunion universelle.

D'autres occasions de suivi se présenteront lors des réunions régionales des commissions nationales de DIH prévues en 2022, sous réserve de l'évolution de la pandémie. Ces réunions devraient avoir lieu dans les régions suivantes : Proche et Moyen-Orient (NAME), Europe occidentale, et Europe de l'Est/Asie centrale. Ces réunions régionales sont importantes car elles permettent aux commissions nationales de poursuivre leurs efforts pour obtenir des résultats concrets en collaborant avec d'autres instances dans leur région.

À plus long terme, la XXXIVe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge devrait avoir lieu en 2023, tandis que notre prochaine réunion universelle est prévue pour 2025.

En attendant, les commissions nationales de DIH peuvent rester en contact les unes avec les autres via notre communauté en ligne JIVE.

10. Enfin, Anne, dites-nous où l'on peut trouver plus d'informations sur la réunion ?

AQ : Les discours d'ouverture et de clôture de la cinquième Réunion universelle, prononcés respectivement par Mme Helen Durham, directrice du droit international et des politiques humanitaires au CICR, et Mme Cordula Droege, conseillère juridique et cheffe de la Division juridique du CICR, peuvent être consultés ici .

Un rapport final de la réunion devrait également être publié au début de 2022.

Le discours d'ouverture du Dr Helen Durham, directrice du droit international et des politiques du CICR

Télécharger
Fichier PDF
133.96 KB

Le discours de clôture du Dr Helen Durham, directrice du droit international et des politiques du CICR

Télécharger
Fichier PDF
148.9 KB