Déclaration

Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques: déclaration du CICR, 2016

Vingt-et-unième session de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques, 2016, La Haye (Pays-Bas). Déclaration du CICR.

Nous condamnons fermement tout emploi d'armes chimiques, par qui que ce soit et où que ce soit, et nous sommes profondément préoccupés par les allégations faisant état d'une utilisation persistante de ces armes en 2016.

La Convention sur les armes chimiques est l'un des traités internationaux les plus largement acceptés. Cet instrument a acquis une portée quasi universelle, 192 États parties ayant pris l'engagement d'éliminer les armes chimiques et d'empêcher tout retour à la guerre chimique.

Aujourd'hui plus que jamais, il est important que les États parties s'attachent à promouvoir son universalisation, car rien ne saurait justifier que l'on reste en dehors de cette convention. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) s'associe aux appels lancés pour que les cinq États ne l'ayant pas encore fait – à savoir la République populaire démocratique de Corée, l'Égypte, Israël, la Palestine et le Soudan du Sud – la ratifient ou y adhèrent sans délai.

Le bannissement total de cette catégorie d'armes, tel que le prévoit la Convention, est profondément ancré dans le tabou ancestral qui proscrit l'emploi de poison comme moyen de guerre. Aujourd'hui, l'interdiction d'utiliser des armes chimiques, consacrée par le Protocole de Genève de 1925 et la Convention sur les armes chimiques, est une règle de droit international humanitaire coutumier. En tant que telle, elle est contraignante pour toutes les parties à un conflit armé – qu'il s'agisse d'États ou de groupes armés non étatiques. L'interdiction est absolue et son champ est vaste, puisqu'elle vise les armes chimiques tant classiques qu'artisanales.

Si la norme interdisant l'emploi des armes chimiques est universelle et lie toute partie à un conflit armé, sa force a été mise à rude épreuve par les événements récents. Il incombe dès lors à tous les États parties à la Convention de promouvoir et d'assurer le respect universel de l'interdiction.

Le CICR est consterné par le fait que des armes chimiques aient été utilisées de manière répétée en Syrie au cours des quatre dernières années, comme l'ont confirmé les conclusions de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) et les enquêtes de l'Organisation des Nations Unies (ONU) ainsi que du Mécanisme d'enquête conjoint. Nous condamnons fermement tout emploi d'armes chimiques, par qui que ce soit et où que ce soit, et nous sommes profondément préoccupés par les allégations faisant état d'une utilisation persistante de ces armes en 2016. Ces moyens de guerre inhumains sont strictement prohibés, et leur emploi constitue une violation grave du droit international humanitaire.

Tous les États parties doivent se donner pour priorité absolue d'empêcher toute nouvelle utilisation de ces armes. Dans cette perspective, le CICR salue la décision adoptée le 11 novembre 2016 par le Conseil exécutif de l'OIAC condamnant l'usage d'armes chimiques, appelant toutes les parties à s'abstenir de toute nouvelle utilisation et affirmant que les responsables seront tenus de répondre de leurs actes. Nous appelons une fois de plus toutes les parties aux conflits armés en Syrie, en Irak et ailleurs à respecter l'interdiction d'utiliser ces armes – pour le bien de l'humanité.

Le CICR se félicite des efforts constants déployés par les États, l'OIAC et l'ONU pour éliminer les stocks d'armes chimiques, enquêter sur les allégations d'utilisation et établir les responsabilités.

En vue de prévenir un ultérieur affaiblissement de la norme interdisant l'emploi de ces armes, le CICR tient par ailleurs à rappeler sa position et l'appel concomitant qu'il a lancé aux États concernant la mise au point et l'utilisation de produits chimiques hautement toxiques comme armes à des fins de maintien de l'ordre – connus sous le nom d'« agents chimiques incapacitants » ou de « produits chimiques agissant sur le système nerveux central ».

Comme indiqué dans le rapport publié en avril 2016 par le Conseil scientifique consultatif de l'OIAC, les débats techniques sur le sujet sont exhaustifs. Du reste, il ne s'agit pas tant d'une question technique que d'une question de droit et de politiques, et aussi d'un motif de préoccupation humanitaire, qui est au cœur de l'interdiction des armes chimiques.

La position du CICR depuis février 2013 est que l'utilisation de produits chimiques toxiques comme armes à des fins de maintien de l'ordre devrait être limitée aux seuls agents de lutte antiémeute. Nous avons ainsi appelé les États, d'une part, à adopter une politique nationale à cet effet et, d'autre part, à entamer des discussions multilatérales en vue de clarifier cette question.

Le CICR salue la proposition formulée par un groupe de 35 États dans un document adressé à la présente Conférence (intitulé « Dissémination par aérosol de produits chimiques agissant sur le système nerveux central à des fins de maintien de l'ordre »), appelant la tenue de débats internationaux au sein des organes directeurs de l'OIAC afin d'examiner les graves risques que pose une telle utilisation au regard de la Convention sur les armes chimiques.

Le CICR exhorte collectivement les États à répondre à cet appel, tout en demandant individuellement à chacun d'entre eux de rejoindre le cercle de ceux qui ont déjà confirmé l'adoption d'une politique et d'une législation nationales limitant aux seuls agents de lutte antiémeute l'emploi de produits chimiques toxiques comme armes à des fins de maintien de l'ordre.

Cela correspond d'une part à la pratique de la majorité des États depuis l'entrée en vigueur de la Convention sur les armes chimiques, et renforce d'autre part l'objet et le but du traité.

Pour conclure, le CICR appelle les États parties à se montrer fermes dans leur engagement d'éliminer les armes chimiques, d'empêcher toute nouvelle utilisation de ces armes et de prévenir leur réapparition.

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