Article

La mésinformation, la désinformation et les discours de haine – Questions et réponses

Le CICR prend au sérieux la question de la mésinformation, la désinformation et les discours de haine lors des conflits armés, et est déterminé à trouver des moyens efficaces de répondre à ce problème et à ses conséquences.

En quoi la mésinformation, la désinformation et les discours de haine causent-ils du tort aux populations touchées par des conflits et aux opérations humanitaires ?

La mésinformation et la désinformation peuvent accroître l'exposition des populations à différents risques et vulnérabilités. Par exemple, si des personnes déplacées ayant besoin d'aide humanitaire reçoivent des informations intentionnellement trompeuses sur des ressources et des services vitaux, elles peuvent être orientées vers le danger plutôt que vers une assistance.

Quant aux discours de haine, ils contribuent directement ou indirectement à menacer la sécurité ou la dignité des populations civiles. Des discours de haine en ligne qui appellent à la violence contre un groupe minoritaire, par exemple, peuvent contribuer à causer des dommages psychologiques et sociaux à travers le harcèlement, la diffamation et l'intimidation.

La mésinformation et la désinformation peuvent également réduire la capacité des organisations humanitaires à opérer dans certaines zones, risquant de laisser les personnes touchées par un conflit armé ou d'autres situations de violence en proie à des besoins non satisfaits. Quand des informations fausses ou manipulées se répandent, elles peuvent saper la confiance des communautés et nuire à la réputation des acteurs humanitaires.

Pour une organisation comme la nôtre, dont l'action est fondée sur la confiance, la diffusion d'informations fausses, en particulier dans des situations tendues, pourrait rapidement empêcher le personnel humanitaire de se déplacer sur le terrain pour distribuer des secours vitaux, visiter les détenus ou encore apporter des nouvelles aux personnes qui ont perdu le contact avec un membre de leur famille.

Y a-t-il d'autres exemples de dommages réels causés par la mésinformation, la désinformation et les discours de haine ?

Lorsque les rumeurs, la stigmatisation et les propos malveillants se propagent, cela peut finir par empêcher les personnes déplacées ou les familles associées à l'une ou l'autre des parties à un conflit de rentrer dans leur lieu d'origine en toute sécurité.
La diffusion de fausses informations sur un service humanitaire peut aussi amener les personnes affectées à perdre confiance et les priver ainsi d'accès à des services essentiels à leur bien-être, leur sécurité ou leur dignité. Il arrive par exemple que des personnes aient peur de recevoir un vaccin ou un service de santé, ou que d'autres refusent qu'on leur remette la dépouille d'un proche décédé parce qu'elles ne croient plus les informations qui leur ont été transmises.

La mésinformation, la désinformation et les discours de haine peuvent encourager les actes de violence au sein d'une communauté, notamment contre des groupes vulnérables ou minoritaires (p. ex. sur le plan ethnique), mais aussi contre des organisations et des équipes humanitaires ou médicales.

Quand la distorsion de l'information réduit la capacité des personnes touchées par un conflit à prendre des décisions éclairées – concernant leurs besoins vitaux tels que l'accès à la sécurité, à un abri et aux soins de santé –, elle peut entraîner des dommages bien réels.

Dans les communautés confrontées à la propagation (organisée ou non) d'informations fausses ou trompeuses, un environnement marqué par la haine et par des incitations à la violence en ligne et dans les médias peut provoquer des morts et d'autres effets néfastes sur la sécurité et la dignité des personnes.

 La diffusion de fausses informations porte-t-elle atteinte au droit international humanitaire (DIH) ?

Certains recours à la désinformation et aux discours de haine sont effectivement contraires au DIH et à d'autres règles du droit international. Concrètement, le DIH interdit d'encourager la perpétration de violations du DIH (y compris de crimes de guerre), en ligne ou hors ligne. Il interdit de même les « actes ou menaces de violence dont le but principal est de répandre la terreur parmi la population civile ». Autrement dit, les menaces de violence sont interdites s'il peut être démontré que leur but principal est de répandre la terreur parmi la population civile.

Le DIH interdit en outre d'inciter à la violence contre le personnel et les activités humanitaires, et la désinformation visant à contrer ou entraver l'action humanitaire est difficilement conciliable avec cette branche du droit. Dès lors, les États et les autres parties aux conflits armés doivent non seulement s'abstenir de mener de telles opérations, mais aussi protéger les organisations humanitaires impartiales lorsque des acteurs privés (notamment des entreprises) menacent leurs activités.

Toutes les opérations de mésinformation ou de désinformation pendant un conflit armé ne sont pas forcément couvertes par le DIH. Cela étant dit, il est généralement admis depuis des décennies que les activités humanitaires impartiales et le personnel humanitaire qui y participe doivent être respectés et protégés.

Comment le CICR traite-t-il la question de la mésinformation, de la désinformation et des discours de haine ?

Le CICR prend au sérieux la question de la mésinformation, de la désinformation et des discours de haine lors des conflits armés, et est déterminé à trouver des moyens efficaces de répondre à ce problème et à ses conséquences. La tâche est toutefois de taille car les développements technologiques rapides, combinés à la politisation et à la polarisation des sociétés, ne font qu'amplifier et compliquer le phénomène.

Il est absolument essentiel que nous parvenions à relever ces défis, notamment en raison de leurs conséquences très concrètes pour les civils comme les personnes déplacées et les familles de personnes disparues. Il est tout aussi important que nous conservions la confiance des personnes et des communautés auprès desquelles nous travaillons, tout en évitant d'être instrumentalisés à des fins politiques.

Alors qu'on s'attend dans les situations de conflit armé à des menaces numériques de plus en plus nombreuses, sophistiquées et coordonnées, le CICR appelle toutes les parties concernées, y compris les États, les médias, les entreprises technologiques et les autres sociétés privées, à respecter et protéger les organisations humanitaires impartiales, neutres et indépendantes et à prévenir le déclenchement et la diffusion de campagnes de désinformation, de mésinformation et des discours de haine. Il encourage également tout un chacun à faire preuve de vigilance avant de partager des informations et à contribuer à stopper la propagation de ces phénomènes. Le CICR s'engage à coopérer avec ses partenaires pour s'attaquer à leurs causes profondes, et promouvoir ainsi un monde mieux informé et plus pacifique.