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Plus de ressources et un engagement plus fort pour prendre en charge les corps des migrants décédés

Alors que le nombre de migrants qui meurent en tentant de rejoindre l'Europe ne cesse d'augmenter, le travail d'identification et de gestion des dépouilles n'avance que très lentement et nécessite de toute urgence davantage de ressources et un soutien politique.

En 2015, plus de 3 000 migrants ont perdu la vie, pour la plupart noyés en Méditerranée. La moitié des corps récupérés n'ont pu, à ce jour, être identifiés. « Les gouvernements et les différentes structures régionales doivent être plus actifs pour faire face à cette situation », déclare le docteur Morris Tidball-Binz, responsable des services de médecine légale du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

« Faute de ressources, des médecins légistes travaillent à l'identification des corps les mains nues, au sens propre du terme. C'est tout simplement inacceptable », ajoute-t-il.

Le docteur Tidball-Binz s'est exprimé à l'issue d'une conférence organisée conjointement par le CICR et la Croix-Rouge espagnole, à Barcelone, axée sur la recherche des moyens de mieux identifier et gérer les dépouilles des migrants.

« Parmi les mesures proposées lors de la réunion, il y a lieu de noter l'augmentation du nombre de pathologistes judiciaires formés sur les grandes îles grecques, et l'amélioration de la fourniture de consommables, d'installations de réfrigération et d'autres équipements », déclare Constantinos Couvaris, consultant légiste travaillant pour la Croix-Rouge grecque.

Il précise qu'une chose très importante doit être faite et sur laquelle aucune décision n'a encore été prise, à savoir collecter et centraliser correctement au niveau national toutes les données sur les migrants décédés, ce qui nécessite des systèmes innovants tant pour la collecte que pour le partage de l'information. De plus, un lien reste à établir entre la base de données relative aux dépouilles et les demandes d'identification recueillies.

« Si certains changements dépendent de la capacité de la Grèce surendettée à trouver de l'argent ou à obtenir un soutien extérieur, d'autres sont une question d'état d'esprit autant que d'argent », explique M. Couvaris.

« Il est également impératif d'adopter une approche plus large sur les questions de médecine légale », déclare Maria Dolores Morcillo Méndez, conseillère régionale de médecine légale du CICR pour l'Europe.

« Il est essentiel d'améliorer le dialogue avec les autorités des pays d'origine pour faciliter le processus d'identification et apporter des réponses aux familles endeuillées sur le sort de leurs proches disparus », ajoute-t-elle.

« Nous commençons à examiner la situation en dehors de la région méditerranéenne » précise-t-elle, en ajoutant que cette approche recommandée par la conférence de Barcelone, suite à la réunion de 2013 à Milan, devrait être suivie par d'autres régions car cette question a une dimension mondiale.

Le rôle capital des Sociétés nationales de la Croix-Rouge qui aident les familles des migrants décédés, désespérés dans l'attente de nouvelles de leurs êtres chers, à avoir un contact avec les autorités, a été mis en lumière à Barcelone, tout comme le besoin du soutien d'organisations comme le Conseil de l'Europe ou l'agence Frontex.

« Le problème est considérable, car au moins 30 000 migrants sont morts au cours des 25 dernières années.

 

Les pays ont des obligations juridiques envers les morts, qu'ils soient migrants ou non, or dans nombre de cas, ces obligations ne sont pas respectées

conclut le docteur Tidball-Binz.