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Toute personne blessée ou malade a droit à des soins de santé pendant un conflit armé

À l'occasion de la Journée internationale des droits de l'homme, nous, les organisations soussignées, exprimons notre appui à l'initiative « Les soins de santé en danger ». Nous réitérons avec force notre appel pour que le droit des blessés et des malades à recevoir des soins de santé pendant un conflit armé soit respecté et protégé, et pour que les attaques contre les personnels de santé et les structures médicales cessent.

Nous lançons en particulier un appel aux États parties aux Conventions de Genève, dont les règles visent à imposer des limites aux méthodes et aux moyens de guerre et à protéger les personnes blessées dans une situation de conflit, afin qu'ils agissent. Il y a un an, jour pour jour, ces États se sont réunis à Genève à l'occasion de la XXXIIe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. En adoptant la résolution 4 intitulée « Les soins de santé en danger – Continuer ensemble à protéger la fourniture des soins de santé », ils ont réaffirmé leur ferme engagement à protéger les blessés et les malades, les personnels de santé, les structures médicales, et les moyens de transport sanitaire.

Nous lançons également un appel aux États membres du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui ont fait écho à l'engagement exprimé dans la résolution 4 et qui, en mai 2016, ont adopté la résolution 2286 (2016) sur la protection des soins de santé en période de conflit armé.

En dépit de ces engagements, les attaques contre les services de santé se poursuivent sans relâche.

En Syrie : jusqu'ici en 2016, l'Organisation mondiale de la santé a enregistré plus de 120 attaques contre des structures médicales, en plus des 135 attaques enregistrées en 2015 et des 93 attaques de 2014. Malgré la recrudescence actuelle du conflit et les conditions désespérées dans lesquelles vit la population, seul un des neuf hôpitaux d'Alep-Est est pleinement opérationnel, et quatre hôpitaux sont complètement hors service. Le personnel médical est épuisé et les stocks manquent cruellement. Alep-Ouest n'a pas non plus été épargné par la violence aveugle, et les hôpitaux ont du mal à faire face à l'afflux continu de patients.

Au Yémen : depuis le début du conflit en 2015, plus de 160 attaques contre des hôpitaux, des dispensaires et des personnels de santé ont été signalées au Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Moins de la moitié des structures médicales du pays est opérationnelle. En moyenne, 20 personnes – hommes, femmes et enfants – meurent chaque jour des suites de blessures guérissables et de maladies curables, faute de médicaments adaptés et d'hôpitaux en état de fonctionner.

En Irak : au cours de l'année écoulée, des hôpitaux et d'autres structures médicales ont été endommagés, détruits et pillés, entravant l'accès des civils aux services médicaux dans les provinces durement touchées par le conflit. Dans certaines régions, plus de 45% des professionnels de la santé ont fui depuis 2014. Les véhicules sanitaires sont souvent empêchés de rejoindre les structures médicales et, dans certains cas, utilisés abusivement par les attaquants. Les symboles de la protection et de l'assistance médicales sont profanés.

En Afghanistan, en Libye, au Soudan du Sud – et la liste est encore longue : les attaques contre les patients et les personnels de santé qui soignent les blessés et les malades dans les situations de conflit armé sont l'un des actes les plus effroyables commis à l'encontre de notre humanité commune. Cette violence tue ou mutile de nombreuses personnes ; empêche des femmes sur le point d'accoucher de se rendre à l'hôpital à temps car les ambulances censées venir les chercher sont la cible d'attaques ; prive de traitement des personnes âgées atteintes de maladies chroniques ; et empêche des enfants d'être vaccinés. Des bébés prématurés doivent être retirés des incubateurs à la suite d'attaques aériennes perpétrées contre des hôpitaux, et des médecins sont contraints de voir leurs patients mourir parce qu'ils n'ont plus de médicaments pour les traiter. Les patients et leurs familles, les personnels de santé et des communautés tout entières paient un très lourd tribut. Il faut que cela cesse. Les guerres ont des règles.

Les États doivent honorer leurs engagements sans plus attendre et mettre fin à cette violence.

Nous exhortons les personnes engagées dans les conflits en cours à épargner les hôpitaux et autres infrastructures civiles et à les protéger contre les hostilités. Les gouvernements qui ont une influence sur les parties belligérantes devraient faire pression sur ces dernières pour qu'elles se conforment à leurs obligations au regard du droit international humanitaire.

Les parties au conflit doivent respecter l'inviolabilité des structures médicales et l'obligation éthique qu'ont les personnels de santé de soigner tous les patients, sans distinction aucune.

Elles doivent permettre l'acheminement sans entrave des secours médicaux et l'accès des personnes ayant besoin de soins aux structures médicales.

Elles devraient mener des enquêtes exhaustives, rapides, impartiales et indépendantes sur les incidents qui entravent la fourniture de soins de santé en toute sécurité.

Elles devraient également exhorter leurs forces militaires à prévoir des mesures de précaution afin de protéger les blessés et les malades, ainsi que le personnel de santé, les structures médicales et les moyens de transport sanitaire, lors de la planification et de l'exécution des opérations militaires.

Elles devraient enfin assurer la promotion et le respect du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme, et diffuser, en collaboration avec les institutions concernées, les « Principes éthiques relatifs à la fourniture de soins de santé en période de conflit armé et dans d'autres situations d'urgence » auprès du grand public et des forces armées.

Il y a des limites à la manière de faire la guerre. Toute personne blessée ou malade a droit à des soins de santé. Même pendant un conflit.

  • Liste des signataires
  • Médecins sans frontières
  • International Alliance of Patients' Organizations (IAPO)
  • Comité international de médicine militaire (CIMM)
  • Comité international de la Croix-Rouge (CICR)
  • Conseil International des Infirmières
  • Fédération internationale des associations d'étudiants en médecine (IFMSA)
  • Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
  • Fédération internationale des hôpitaux (FIH)
  • Confédération mondiale pour la thérapie physique (WCPT)
  • Fédération mondiale pour l'éducation médicale (WFME)
  • Association médicale mondiale (AMM)